Performance in Postmodern Culture, Milwaukee, 1977 : un colloque aux échos très contemporains.
Le colloque américain de Milwaukee Performance in Postmodern Culture (1977, organisé par Michel Benamou) constitue un moment décisif dans la construction de la notion contemporaine de performance (entendue comme acte dont la dimension processuelle constitue la signification autant que le résultat). A Milwaukee, les différents intervenants vont chercher à faire de la performance une notion théorique fondamentale pour repenser les processus sociaux, créatifs, ceux de réception des œuvres d’art ou d’interprétation des textes, et plus largement, pour décrire toute réalité. Avec Milwaukee, toute chose devient intelligible comme performance, comme processus signifiant. On souhaiterait proposer une mise en perspective historique et théorique des pistes de recherche lancées dans ce moment singulier, notamment parce que, si certaines d’entre elles ont très rapidement fait époque (Michel Benamou : « la performance est le mode unificateur du postmoderne » ; « est-ce que tout depuis le politique jusqu’au poétique est devenu théâtral ? »), d’autres ont au contraire tardé à trouver une réception, voire ont été totalement mises de côté, notamment dans le monde de l’art. Comme le décrit Benamou dans la préface aux actes du colloque, Milwaukee repose sur une hypothèse : il faut concilier théorie postmoderne (crise du sens, du centre, des distinctions et des hiérarchies) et paradigme théâtral (entendons : la distinction entre acteur et spectateur, décrite par Benamou comme une distinction anthropologique fondamentale), au risque de sombrer dans un monde théoriquement inintelligible. Or, l’importance du paradigme théâtral a été largement contestée dans les années 1980 et 1990 par de nombreux théoriciens et critiques d’art qui s’aventuraient à traiter d’art de la performance. On se proposera d’étudier les répercussions de cette contestation sur la théorie de la performance artistique, et les impasses qui en découlent – impasses que Benamou entrevoyait déjà (évoquant la défense d’un « présent insipide » et un « refus de l’histoire »). On envisagera aussi les échos des recherches menées à Milwaukee dans les débats d’aujourd’hui sur la performance artistique, et notamment le retour en force du paradigme théâtral chez de nombreux praticiens et théoriciens.
Né en 1978. Enseigne l’histoire des arts à la HEAR (Haute École des Arts du Rhin, site Strasbourg). Docteur, il a soutenu une thèse sur l’art de la performance et son rapport au document (« La performance à l’épreuve de ses médiations », Université Sorbonne-Nouvelle Paris III, sous la direction de Marie-Dominique Popelard). Il est aussi critique d’art (Art 21, L’Art même, Artpress) et commissaire d’exposition.